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Batifolire, tribulations en zone littéraire
8 novembre 2010

Faïza Guène, je la kiffe.

     En 2004, débarquait Faïza Guène, toute jeune auteure d'alors 19 ans qui ne savait pas encore qu'elle rencontrerait un franc succès. 400 000 exemplaires de Kiffe-kiffe demain, traduction dans plus de 26 pays et un surnom un peu raccourci par les jounalistes « la Sagan des banlieues ». Elle est jeune, elle écrit, elle est née dans le 9-2. Sagan des banlieues CQFD. Sa bio, le succès, vous trouverez tout ça tout bien expliqué comme il faut sur le net. Retour sur ses trois romans en attendant le prochain.

 

Kiffe kiffe demain, Hachette Littératures 2004

  KiffeKiffeDemainDoria, 15 ans habite dans une cité avec sa mère, femme de ménage dans un Formule 1 et nous raconte son quotidien entre ses RDV chez sa psy qui sent le parapoux, Nabil le nul qui lui donne des cours ou encore Hamoudi, un grand de la cité qui tient le rôle du grand frère. Doria a un regard à la fois très mature et très drôle sur tout ce qui l'entoure, ce qui fait que l'on passe un agréable moment en sa compagnie.

  Quand elle raconte quelque chose, elle n'y va pas par quatre chemins et utilise son langage à elle, celui de la cité fait de codes et références qui amusent le lecteur initié. C'est drôle et ça fait partie des premières boutures d'une nouvelle génération de littérature, celle dite « urbaine »  qui aborde avec un langage moderne des thèmes résolument contemporains, de quoi booster nos lectures.

  De kif kif demain à kiffe kiffe demain, il n'y a qu'un pas et on espère que ça s'appliquera à l'oeuvre de Faïza Guène qui nous a déjà montré qu'elle sait se renouveller pour notre plus grand plaisir.

 

 

Du rêve pour les oufs, Hachette Littératures 2006

 

revouf   Assurément mon préféré. Même narratrice féminine, même banlieue environnante, même langages et mêmes codes,  mais Faïza a grandi et ses personnages aussi.

  Alhème (rêve en arabe...), 24 ans, tient le rôle de la mère depuis que la sienne a été assassinée en Algérie et que son père a perdu la boule suite à un accident. Alhème galère entre son frère de 15 ans à surveiller, les visas à renouveler à la préfecture et les petits boulots qui s'enchaînent. Heureusement, il y a les copines, les potins autour d'un café et l'amour, peut-être, pour redorer le tableau. Il y a aussi Tante Mariatou qui incarne la parole sage du roman au travers notamment de ses proverbes et de celui qui décrit bien le roman : « Les plus belles histoires sont celles qui commencent mal ». Et puis surtout, il y a le voyage, celui qui apporte une trêve et l'envie de continuer.

  Alhème, héroïne des temps modernes, tour à tour, drôle, cynique, autoritaire mais toujours droite et tendre nous donne du rêve qu'on soit ouf ou pas.

 

« En ce moment,j'ai l'impression de perdre au jeu du lancer de dé. On jette le dé sur le tapis des dizaines de fois en y croyant très fort à chaque coup. On l'imagine déjà s'arrêtant sur le glorieux six, mais rien à faire, le score est toujours petit. Un, deux ou trois à la rigueur, jamais plus. On a beau le secouer dans le creux des mains, souffler dessus, fermer les yeux et chuchoter une prière, toujours rien. Je crois qu'au bout de tant d'échecs, on a le droit d'être découragé.
Je me sens comme un enfant puni. Je suis dans un coin de la place Carré et j'espère juste une chose : voir arriver un inconnu et me blottir dans ses bras. Je suis dans un délire complet, c'est carrément un truc de ouf. ».

 

Les gens du Balto, Hachette Littératures 2008

 

  gensbaltoSensiblement différent des deux précédents, on se retrouve avec les gens du Balto dans la toute probable ville de Joigny-les-Deux-Bouts. Ce roman choral, qui s'articule autour du meutre de Joël, la patron du bar le Balto (qu'on a déjà rapidement croisé dans du Rêve pour les oufs), m'a fait penser au film de Klapisch, Un air de famille, de par son point central qui est le bar-tabac du coin et cette impression de huis-clos avec les personnages qui s'expriment chacun à leur tour.

  En effet, chaque mini-chapitre annonce le personnage qui va parler d'abord par son prénom puis par ses surnoms et on voit donc se dessiner l'image extérieure que chacun donne. Seulement, c'est bien la voix intérieure qui va s'exprimer ici et qui va permettre à l'auteure de se faire plaisir à travers une large palette de personnalités. Il y a d'abord le principal intéressé, Joël Morvier, le beauf raciste et pervers qui se fait donc assassiné. Ensuite Yeva, une femme vulgaire qui pourrit la vie de sa famille : son mari Jacques qui passe le plus clair de son temps devant la télé, son aîné Tanièl qui fait pas mal de conneries et son dernier Yeznig, handicapé mental. Viennent pour finir Magalie, la copine de Tanièl, cliché de la blonde pas très maline qui se croit la plus belle et qui s'exprime en lol et franglais ainsi que Nadia et Ali, une paire de jumeaux qui se prennent tout le temps la tête. Tout ce petit monde livre ses états d'âme dans un premier temps puis suite au fait divers relaté par une coupure de presse , chaque monologue se transforme en réponse à l'interrogatoire de police.

  On mène donc l'enquête un peu façon Cluedo : on sait que c'était au Balto, on sait que c'était avec un couteau par contre qui de Yeva, Jacques, Magalie, etc... a tué Jojo? On ne peut que faire des suppositions et attendre le dénouement. Mais Faïza Guène le dit elle-même : c'est moins l'intrigue policière qui l'intéressait plutôt que le fait de pouvoir faire parler plusieurs personnages. Sans dévoiler la fin, on peut dire que si l'écriture de l'auteure est souvent très comique, la chute de ce roman est bien dramatique.

 

 

 

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