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Batifolire, tribulations en zone littéraire
9 octobre 2011

Toute la vie

 Toute la vie... Un titre ambitieux pour un roman qui ne l'est pas moins. Un thème "casse-gueule" comme qui dirait, 264 pages pour raconter le cancer d'un enfant,  la mort au bout mais aussi des liens qui lient la famille, de l'amour présent ou non, de sentiments très complexes au final. Mais cela tout en subtilité avec un intelligent dosage de traits d'humour, de folie et de vraie vie. Ca faisait longtemps que j'avais pas versé ma larme sur un roman tiens!

 couvtoutelavieToute la vie, Jérôme Bourgine, Exprim' chez Sarbacane. Octobre 2011.

 

 Dans la famille Gravelos (un nom comme ça, "ça s'invente pas!"), je demande la mère Isabelle, un peu timbrée asteure, c'est qu'elle n'a pas eu une vie facile, handicapée de l'amour que ce soit avec les hommes ou ses enfants. Puis je voudrais la fille, Hannah, 12 ans qui en valent au moins trois fois plus, télépathe, philosophe, poétesse qui, elle, sait bien pratiquer l'amour  mais seulement s'il est vache. Car il s'agit bien de ça, envers, je vous le demande, Michel, le fils aîné, passioné de phacochères, de comment marche le monde et atteint d'un lymphome, celui dans les 90% normalement, où tu meurs pas. Normalement. Et puis quand même pour compléter ma famille il me faut Daniel, Dan ou Danny, le voisin qui est pour chacun une pièce maîtresse du jeu : l'amant, l'ami, l'accompagnateur, le prof de maths, le fabriqueur de cabanes, le taxi, bref un peu indispensable sinon t'as pas tout le jeu.

 Voilà pour la présentation du quatuor qui va évoluer autour de la maladie de Michou, gérant chacun à sa manière et l'accompagnant tant bien que mal  au cours des différents niveaux qu'il va devoir passer jusqu'à son combat final contre le Boss, belle allégorie de l'étape ultime.

« Moi, je dis : la vie normale, elle est vachement sympa, en réalité. C’est con qu’il faille tomber malade pour s’en rendre compte. Papi, le père de Fred, dit tout le temps : Notre santé est notre bien le plus précieux. J’ai toujours pensé : truc de vieux schnok. Plus maintenant. »

 

  Toute la vie m'a fait pensé à mon film préféré de la Terre entière, au titre un peu semblable, La vie est belle. Je ne vous ferai pas l'affront de vous rabacher le pitch donc je vais rentrer dans le vif du sujet : il y a du Benigni dans Hannah et sa clairvoyance sur la situation. Elle sait que son frère est atteint du maladie, celle du Mal de notre siècle au nom très sentencieux : le cancer. Seulement même si Michel a 13 ans (bon elle, elle est censée en avoir 12 mais elle est vachement maline pour son âge), elle est consciente qu'il est encore un enfant, privé du dehors, de jeu, de vie, qui est complètement perdu et à qui elle va rendre le parcours plus ludique. Désormais, son frère doit évoluer par niveaux, gagner des points pour arriver aux étapes supérieures. Comme quand la guerre était présentée à Josué comme un immense jeu avec un char à la clé pour les vainqueurs. C'est ça qui est beau dans ce roman, cette façon de tanscender la réalité par un exercice de pensée et de représentation qui devient salvateur. Et cet amour à l'intérieur de la fratrie malgré les piques envoyées deci delà qui constituent entre autres quelques pirouettes stylistiques très remarquables tout au long du roman. 

 Mais la petite galerie de personnages présente également d'autres intérêts sous les traits du personnage de la mère, très bien dessinée dans son rôle de nana vulgos incapable de prendre son fils dans les bras. "Journée de merde. J'le savais forcément, un gosse né cancer ascendant cancer." Car en effet, le roman se découpe en polyphonie et permet donc d'approcher le caractère et la psychologie de chacun.

 On doute donc également avec Daniel qui se demande constamment si les choix qu'il fait sont les bons, qui traîne son passé merdique comme un boulet mais qui finalement prend la bonne décision : celle d'accompagner tout simplement Michel. Car comme l'annonce la citation en exergue du roman, "accompagner, c'est cheminer aux côtés de celui qui conduit. Ni plus, ni moins."

 Et accompagner, on le fait nous aussi un peu en suivant Michel, ce petit bout d'homme qui n'a pas sa langue dans sa poche, qui ne demande qu'à être aimé et à vivre. Il n'est pas présenté en héros, personne ne l'est dans ce roman et c'est au final ce qui fonctionne sur le canal lacrymal. C'est vrai, c'est beau et c'est fort.

 

 Voir d'autres avis : Otium, Des romans entre deux mondes, La littérature jeunesse de Judith et Sophie



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Commentaires
S
Contente qu'il t'ai plu. J'ai été conquise aussi.
A
chouette remerciement! contente de voir que toute la petite famille se porte bien!<br /> il est vrai qu'il y a des sujets qui nous touchent plus que d'autres et des manières d'écrire qui nous transportent également plus. Je ne pouvais qu'être sensible à Toute la vie. Une jolie réussite! bravo!
J
Bonjour, je la ferais courte : c'est bon d'être lu. Je veux dire, compris (C'est Michel Bovary, en moi, qui parle, là). Merci pour cette belle critique (de la part de Danieln celle-ci). On va pas en faire un fromage non plus, d'accord (Iza), mais quoi : Si on ne dit pas les choses quand elles adviennent, on les dit quand ?... Qui sait ce que la Vie ne nous réserve pas, pas vrai ? (Han).<br /> <br /> Portez-vous bien,<br /> <br /> Jérôme, le père de la portée.<br /> <br /> Jérôme
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