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Batifolire, tribulations en zone littéraire
2 novembre 2011

Adulte à présent

 Edgar Sekloka est un acharné de mots que ce soit dans ses textes mis en musique au sein de son excellent groupe Milk Coffee & Sugar ou encore dans ses romans, Coffee paru en 2008 et Adulte à présent, fraîchement imprimé. Des mots choisis avec soin, utilisés avec goût et mis les uns à côté des autres avec un talent indéniable.

308106_254315447944957_254309961278839_732602_1326995255_n Adulte à présent, Edgar Sekloka, Exprim' chez Sarbacane, novembre 2011

 La cadette a 15 ans, habite à Douala au Cameroun et voit sa famille se faire tuer sous ses yeux lors d'une émeute en opposition au gouvernement. Douleur du pays en climat hostile, du deuil imposé et d'une nouvelle vie à qui elle va devoir faire face malgré elle. Le fils en a 13, habite à New-York aux Etat-Unis, "où les gens sont en guerre dans un pays en paix", dans un quartier qui pue la violence et la drogue, entouré de parents qui de déchirent. Il aspire à autre chose. Ils se rencontrent, s'apprivoisent car il faut "tomber amoureux pour se relever à deux" et apprennent à être des adultes à présent.

«Ca la brûle. Ca la brûle mais elle avance, car c'est à se brûler qu'on devient grand, elle le sait maintenant - si, si, elle le sait - et, de petits pas en grandes brûlures, de Lendi à Rotting Paris, elle marche au loin de son enfance, se découvre adulte à présent. »

 « Ses yeux piquent, mais le fils les garde ouverts, car c'est à bien voir qu'on devient grand. Il le sait - si, si, il le sait - et de petites piqûres en petites larmes, du couloir au salon, il s'éloigne de son enfance. Il éteint l'écran plat et découvre, dans le reflet, que ses yeux brûlent de le voir adulte à présent. »

 Construit en trois parties - celle de la cadette, celle du fils puis celle de leur rencontre - Adulte à présent expose des épreuves de vies de deux personnages qui ne seront jamais identifiés par leur prénoms comme pour toucher de plus près leurs fêlures universelles. Car le roman part d'abord de faits et lieux réels, les émeutes au Cameroun, la noirceur des quartiers malfamés de New-York qui pourraient finalement être n'importe où ailleurs pourvu que le manque d'humanité soit roi. Les portraits, très justes, sont servis par une langue riche et une technique de la description parfaitement maîtrisée. Edgar Sekloka transforme l'essai (qui n'en était pas un!) réalisé avec Coffee et nous expose ses dons de narrateur, de celui qui sait donner une voix et une âme à son texte.

  Apprendre à vivre avec la douleur quotidienne, survivre dans un monde qui ne crâche que du poison mortel, en étant armé avec un seul antidote, celui de l'amour peut-être, la cadette et le fils nous ouvrent quant à eux leurs plaies sans précautions et nous amènent à être un peu plus adulte à présent.

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Commentaires
A
Je le prends en note!
A
j'ai pour grand défaut de ne pas être raisonnable, quand j'aime je ne pèse pas les mots!<br /> Flo Jallier a également écrit Les filles ne mentent jamais mais je n'ai pas eu l'occasion de le lire! ce sera une découverte totale!
S
J'ai très hâte de le commencer également, même si je n'ai pas lu Coffee, mais tu en as fait suffisamment d'éloge pour donner une idée de sa qualité ;) (n'empêche il faudra quand même que je le lise !)<br /> Mais j'ai décidé de commencer par le Flo Jallier, la 4e de couverture m'a plu et je pense qu'il est moins connu qu'Edgar Sekloka et qu'une chronique rapide peut lui être plus profitable. A bientôt pour les échanges d'opinion !
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