Sélection : l'Afrique pour les petits
Voici une sélection d'histoire à lire pour les petits à partir de 3 ans sur le thème de l'Afrique.
Méli-Mélo, Martine Bourre, 2003, Milan Jeunesse
Pour commencer à voyager en Afrique, un joli album graphique et poétique sur les habitants et leurs occupations ainsi que sur les animaux.
Martine Bourre utilise la technique du papier découpé pour faire apparaitre les personnages sur fond de motifs africains.
Si vous aimez la série, retrouvez Méli-mélo en Chine, à la ferme, chez les Indiens ou au pays des kanganrous.
Cache cache dans la jungle, Gondek, 2002 Milan
Un album interactif pour les tout-petits, qui n'est plus édité malheureusement mais qui permet par le biais de devinettes de découvrir différents animaux et leurs modes de vie.
La balade de l'éléphant, Hirotaka Nakano, 2010, Autrement jeunesse
A la manière d'un conte de randonnée comme le bateau de Monsieur Zouglouglou, une histoire joliment illustrée par le japonais Nakano : Elfie l'éléphant se ballade avec ses amis Hippo et Croco jusqu'à la chute aquatique. Un album drôle pour retrouver les animaux d'Afrique.
Plein soleil, Antoine Guillopé, 2011, Gautier Languereau
Les illustrations magnifiques d'Antoine Guillopé ajoutées à la finesse du papier découpé qui ont fait sa rénommée. Un joli voyage dans la savane.
Rafara, un conte populaire africain illustré par Anne-Catherine de Boel, 2000, Ecole des Loisirs
Un conte, un peu plus long, pour entrer dans le folklore africain : Rafara, jalousée par des deux grandes soeurs est abandonnée dans la forêt et capturée par l'affreux géant Trimobe. Grâce à l'aide d'une souris, elle s'échappe au détour de quelques péripéties.
Les illustrations à dominante terre, ocre et chocolat sont ponctuées de couleurs et subliment ce conte traditionnel qui marche à tous les coups!
Ah les crocodiles !
Et pour terminer en musique, la comptine "ah les crocodiles" que l'on trouve soit chez Didier soit chez Casterman (mais épuisés) ou édité récemment chez Rue du Monde.
La boîte
La boîte, Anne-Gaëlle Balpe, Exprim' chez Sarbacane, février 2015
Malt, la vingtaine, passe ses journées les fesses posées sur un kiosque en matant l'horizon d'avenir qui va pas bien loin. Sa ville Edens ne respire pas la joie de vivre et ses perspectives oscillent entre manger une pizza avec sa petite amie Jen ou boire des bières avec son pote Jonas. Un jour, abandonnée sur le banc, il trouve une boîte en métal. Elle contient de l'argent et une promesse d'en avoir encore plus en échange d'un service...
"Les paroles chuchotées, les souvenirs racontés encore et encore, jusqu'à extinction des feux, les pardons et les secrets révélés, tout ça, c'est bon pour Hollywood. La plupart du temps, on ne trouve pas les mots et on attend. Et quand c'est fini, on regrette de n'avoir rien osé dire. C'est tout."
L'intrigue prend place dans des villes aux noms évocateurs : Edens, Concorde et Antrace. Le monde imaginaire que l'auteur construit, parfois très américain, donne une ambiance particulière à son récit, très cinématographique. Alliant à cela une maîtrise du suspense et une construction intéressante, Anne-Gaëlle Balpe signe ici un bon thriller original qui tient en haleine jusqu'à la fin.
Marque de fabrique de la collection Exprim', la bande son proposée par l'auteur qui accompagne son écriture et notre lecture : à écouter ici !
On est pas là pour se faire baratiner #6 Philippe Arnaud
Le mois dernier est sorti le second roman de Philippe Arnaud, Indomptables, qui retrace les parcours de jeunes plein de courage et de vie du Cameroun à la France. Un texte très fort qui donne envie d'en savoir plus...
Merci à Philippe Arnaud pour ces échanges et à son éditeur Tibo Bérard qui n'est jamais bien loin !
Le roman s'ouvre sur un texte explicatif qui présente brièvement des ethnies du Cameroun ainsi qu'une tradition culturelle au moment des adieux, qui veut que l'on se dise "on est ensemble", même si l'on se sépare pour un moment. Nous sommes donc, d'emblée, ancrés dans un contexte qui nous plonge dans la réalité camerounaise.
Indomptables
On avait découvert Philippe Arnaud fin 2012 avec son premier roman "La peau d'un autre" qui présentait un huis clos angoissant. Même si l'enfance et l'Afrique étaient déjà présents dans son premier opus, on change de registre ici pour l'air épicé et la chaleur du Cameroun, à la rencontre de deux jeunes garçons intrépides et surtout indomptables...
Indomptables, Philippe Arnaud, septembre 2014, Exprim' chez Sarbacane
Jean-Jules et Mohamadou grandissent ensemble au Cameroun entre jeux d'enfants insouciants et adolescence désenchantée dans l'espoir d'un avenir meilleur. Olivia se démène seule contre ses démons dans son pays, la France. Leurs histoires et celle de leur rencontre sera aussi celle de Mohamed, leur fils et de ses racines.
"Pourvu qu'on ne devienne pas comme eux, Jean-Jules. Ils se compliquent trop la vie. Ils s'inventent des cages et se mettent dedans."
"Par réflexe il lui a saisi la main, et se relevant a vu les longs cheveux noirs et la peau si blanche de la jeune femme. Cette image qui ressemble à un souvenir. Il a entendu ses mots, l'a regardé timidement, comme on essaie de jeter l'ancre à une profondeur inconnue. Tous deux sont restés figés.
Et quelque chose en lui s'est assis sur une branche invisible."
Impossible de lâcher ce tryptique qui nous transporte de l'autre côté de l'océan, là où hommes et femmes rêvent d'un avenir meilleur au risque de perdre leurs vies sur des radeaux de fortune. Car si on connait Lampedusa, île au large de la Sicile, plus pour son nom dans les gros titres que pour son village pittoresque, on ne connait pas les visages et destinées de ses milliers d'anonymes qui débarquent chaque année sur ses côtes. Philippe Arnaud leur donne un nom et une histoire teintée de sagesse africaine et de dure réalité économique qui pousse les populations au pire. Après avoir évoqué, en 2012, les folies meurtières dans les établissements scolaires, il continue sur sa lancée de témoignage de fiction des faits divers de nos sociétés contemporaines. Indomptables est un très beau roman traversé de beaucoup d'amour. Très beau roman sur l'enfance, l'amitié et les liens unissant les membres d'une même famille, sur ce qui nous relie quand "on est ensemble". Très beau roman, vraiment, à la manière de son titre, son sous-titre et son épilogue !
La gueule du loup
Après le très remarqué et primé « Frangine », Marion Brunet fait sa rentrée avec ce second titre « La gueule du loup » qui nous amène dans la tiédeur de la forêt malgache pour un roman d'apprentissage sur fond de thriller.
La gueule du loup, Marion Brunet, Exprim' chez Sarbacane, août 2014
Lou et Mathilde, deux amies d'enfance, décident après leur bac de s'offrir un beau voyage et filent direct vers l'île de Madagascar. Entre découvertes aquatiques et visites citadines, l'aventure va prendre un tournant radical lorsqu'elles rencontrent Fanja une jeune prostituée.
"Son imagination lui souffle des bouts de poèmes exaltés. Sa mère le lui répète assez souvent, pourtant : de la demi-mesure en toute chose, Mathilde ! Et puis quoi encore ? Un demi-bonheur ? Des demi-amis ? Et pourquoi pas une demi-vie tant qu’on y est ?"
Les voyages forment la jeunesse... Quel plaisir de retrouver Marion Brunet ! On renoue avec la même fraîcheur que dans son premier roman et cette plume si légère qui fait que le livre s'engloutit en un rien de temps. L'écriture est fluide, les personnages bien croqués et l'intrigue bien ficelée. C'est un curieux mélange de réalisme dans la manière dont sont abordés les personnages et une fiction au suspens rondement menée, le tout dans un décor entre paradis et enfer. Que demander de plus ? Un autre roman peut-être...
L'étranger
Sorti l'an passé pour l'année du centenaire de la naissance de Camus, ce roman graphique propose une version fidèle et lumineuse de l'Etranger, récit mettant en scène un homme insensible et indifférent au monde qui l'entoure.
L'étranger, Jacques Ferrandez d'après l'oeuvre d'Albert Camus, Fétiche chez Gallimard, Avril 2013
"Aujourd'hui, maman est morte". Célèbre incipit de l'histoire de Mersault, un jeune homme vivant à Alger, qui ne pleure pas à l'enterrement de sa mère. Lors d'une après-midi à la plage, il va tuer un homme sans réellement le vouloir et sera condamné à mort.
"Dans le fond, je n'ignore pas que mourir à 30 ans ou à 70 ans importe peu puisque, naturellement, dans les deux cas, d'autres hommes et d'autres femmes vivront, et cela pendant des milliers d'années."
Jacques Ferrandez nous emmène facilement en Algérie, pays cher à son coeur et arrive à retranscrire l'atmosphère moite de la ville dans laquelle évolue son personnage. Le texte de Camus est ici magnifié par les scènes d'aquarelles lumineuses qui servent de fond aux cases crayonnées. L'auteur s'est focalisé sur les dialogues qu'il a fidélement respecté pour nous offrir un portrait de Meursault saisissant : un homme qui ne croit ni en Dieu, ni en l'amour, ni en la vie. Un homme qui est là par hasard et s'en contente car on s'habitue à tout. Une adaption très réussie en forme de bel hommage pour saisir l'absurde qui n'a cessé de traverser l'oeuvre de Camus.
Bloc de haine
Bruno Lonchampt frappe fort avec son premier roman, Bloc de Haine, et nous emmène sur la planète Marseille pour rencontrer un jeune homme amer qui se retrouve en prison à cause de sa colère. Voyage au bout de la haine et du racisme, saisissant de réalisme.
Bloc de haine, Bruno Lonchampt, Exprim' chez Sarbacane, avril 2014
Alex a 25 ans, il écope sa peine de prison à la Centrale d'arrêt d'Arles. Il a pris sept ans. Il passe sa rage entre les pompes qu'il enchaîne et ses entrainements de musculation et, depuis peu, sur son nouveau compagnon de cellule, Abid, un "arabe" qui n'est pas vraiment tombé au bon endroit...
"Alors il hurle. La gorge racle, les graves s'emballent et se fondent aux aigus enrayés. Ces sons viennent de loin, très loin. Ils sont pourtant bien humains. Si Julie pouvait l'entendre, elle comprendrait sûrement. Tout est dedans."
Au lendemain des élections municipales, Bruno Lonchampt nous offre un roman réellement intéressant en nous donnant à voir une partie de l'électorat du front national. Alex est un anti-héros, rempli de haine et de rancoeur envers les étrangers et plus particulièrement les maghrébins. On découvre son histoire en assemblant les pièces du puzzle distribuées lors des flash-back dans les rues de Marseille, une ville qui est dépeinte avec une tendresse particulière.
De son enfance en famille en passant par sa jeunesse avec les copains, jusqu'à sa rencontre avec Julie, militante au parti FN, l'auteur nous dresse un portrait sans concession et terriblement humain d'un jeune homme complètement perdu, en proie à sa noirceur la plus profonde. A l'étroitesse de la cellule et de l'esprit, s'opposent les mots qui s'imposent, envahissent tout l'espace et la tête du héros. Ces mots qui sont souvenirs et émotions et qui permettent parfois de se libérer de certains carcans.
Mention toute spéciale à la bande son du roman, excellente, qui nous envoie direct vers la cité phocéenne. Marque de fabrique de la collection Exprim', la bande son permet en début de chaque roman de (re)découvrir des titres appréciés par l'auteur qui l'ont inspiré ou qu'il nous suggère d'écouter avant, pendant ou après la lecture. Ici, elle participe au décor et donne un bon échantillon de la chanson française à texte, rap et slam compris, évidemment !
Un petit goût de noisette
Après la trilogie des Celle que je... et de L'immeuble d'en face, on retrouve avec plaisir Vanyda pour ce one shot coloré à picorer !
Un petit goût de noisette, Vanyda, janvier 2014, Dargaud
11 histoires qui s'entremêlent : de petites rencontres en grand amour, le monde est petit mais les personnages toujours grands.
Corentin, Eléonore, Azul, Barnabé, Chloé... A la ville, à la campagne, à Barcelone, aux Pays-Bas... Une nuit ou plus, un peu, beaucoup, à la folie !
"... Mais si ! Un moment parfait, tu sais, c'est un moment suspendu... Un peu entre deux..."
Paul Eluard disait : "Il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous". Vanyda nous avait déjà montré avec L'immeuble d'en face qu'elle savait merveilleusement capter ces instants magiques et furtifs. Avec son nouvel opus, elle réitère en utilisant cette fois la couleur : l'aquarelle vient magnifier les paysages qu'elle dépeint pour leur donner de la vie et de la poésie. Elle nous offre ce petit goût de noisette, doux et sucré et nous laisse sur notre faim, tellement que c'est bien !
Come prima
Meilleur album d'Angoulême cette année, Come prima nous embarque sur les routes avec deux frères que tout oppose pour un retour au pays natal.
Come prima, Alfred, Mirages chez Delcourt, septembre 2013
Juillet 1958. Giovanni vient en France chercher son frère Fabio qu'il n'a pas vu depuis plus de dix ans. Il souhaite que celui-ci rentre en Italie avec lui pour disperser les cendres de leur père. Fabio, distant et belliqueux, ne se laisse convaincre que pour aller récupérer son héritage et prend quand même la route...
"J'étais trop pressé. Il y avait sûrement autre chose à inventer mais j'ai pas su. J'étais trop pressé. Je voulais commencer une vie et ne jamais revenir sur mes pas... C'est pour ça que je suis parti sans rien dire. Sans un mot pour personne... J'ai voulu qu'ils me détestent, qu'ils me haïssent, qu'il m'oublient... pour me donner de bonnes raisons de ne jamais pouvoir revenir... de vraies raisons... Je suis un fugueur...
Mais je suis fatigué et je veux rentrer à la maison."
Road-trip émouvant au coeur des liens du sang. Alfred signe une très belle histoire entre passé et présent avec l'utilisation de deux palettes de couleur différentes pour distinguer les souvenirs du reste. Un album empreint de luminosité qui nous fait voyager dans l'espace et dans le temps.
Comme des images
Engouement mérité sur la toile et les réseaux sociaux pour ce roman qui aborde justement le sujet de nos nouveaux modes de communication et les effets pervers qu'ils peuvent avoir.
Comme des images, Clémentine Beauvais, Exprim' chez Sarbacane, février 2014
Léopoldine, quinze ans, est en seconde à Henri IV, un lycée prestigieux, qui au prix d'une extrême exigence, promet à ses élèves un avenir ambitieux. Un matin, alors qu'elle arrive en cours, les regards sont braqués sur elle : une vidéo compromettante a circulé par mail. Commence alors une journée particulière pour l'adolescente et son entourage.
"Et l'autre, Léo, elle n'aurait pas pu me parler de tout ça, au lieu de le murmurer sur l'oreiller à des mecs qui s'en foutaient? On ne peut pas deviner si les gens ne se mettent pas à dire les choses clairement ! On est pas télépathes. On est pas en communication directe les unes avec les autres. Il faut parler.
C'est infernal, ce silence."
Comme des images... Sommes-nous que des images? Quelle image donnons-nous de nous-mêmes? Quelle valeur ont désormais les images dans un monde saturé d'informations où le contenu multimédia s'est démocratisé? Les images sont-elles éphémères? Autant de thèmes d'actualité qui ont inspiré l'auteure qui est partie d'un fait divers - le suicide d'un jeune homme suite à la diffusion d'une vidéo sur internet par ses camarades - pour nous conter l'histoire de Léopoldine. Le récit rend compte d'une seule journée en mêlant narration mais aussi ajout d'éléments hybrides : extraits de conversations par sms, facebook, devoirs d'école, etc. Avec une construction très bien ficelée, faite de flash-back, et une maîtrise du suspens assez remarquable, Clémentine Beauvais nous emporte avec elle dans ce roman qui se lit d'une traite.