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Batifolire, tribulations en zone littéraire
9 janvier 2012

Le "journal infirme" de Clara Muller

 Karim Madani, auteur de plusieurs polars urbains, reprend avec ce roman un de ses personnage favori, celui de la ville, en imaginant un Paris scindé en deux, écrin du mal-être de son héroïne Clara Muller. "Quand vous aurez ce journal en main, je serai déjà morte". Chronique d'une mort annoncée.

clara
  Le "journal infirme" de Clara Muller, Karim Madani, illustrations de Yosh, Exprim' Sarbacane, janvier 2011                                         

 Clara a 16 ans et vit dans le Paris futuriste de 2015, une ville scindée en deux : il y la Ville Haute, la clean en apparence, petits bourgeois et univers capitonné versus la Ville Basse, la dark où l'on peut se procurer le ciel liquide auprès des dealers des sombres ruelles. La lycéenne est empreinte d'un profond mal-être et ses camarades du lycée n'arrange rien à l'affaire. Qualifiée de freak, de F.F.O. (Fille Frappée d'Opprobre), elle déchaîne les moqueries du clan des populaires. Mais la rentrée arrivant et la venue de Karin, une fille de la Ville Basse, lui offre la possibilité de se faire une amie dans celle qu'elle perçoit comme son double. Toutes deux dotées de facultés surnaturelles et d'une colère haineuse, elles vont se faire justice à leur façon, de celle qui finit dans un bain de sang.

"On peut aller partout, bordel ! Rien ne nous fait peur, puisque rien ne nous attend. "


 D'apparence personnage de science-fiction, Clara Muller incarne l'ado rejetée à l'histoire familiale complexe qui dérive sérieusement jusqu'à son issue fatale. Bien que placé dans le "futur" de 2015, celui-ci est tellement proche que le voyage n'est pas tant temporel mais surtout géographique. L'ambiance du Paris du futur, Ville Haute-Ville Basse, sent le bitume ricain sauce poulet KFC et les lycées supportant les pom-pom girl versus les freaks qui frôlent les casiers. La topographie de la ville est ainsi utilisée pour souligner les contrastes, pour finalement rappeler que le manichéisme n'existe décidément pas. 

 La forme du journal intime est ici renforcée par un travail minutieux sur l'illustration et la mise en page qui présente des griffonnages, des poèmes, des places de ciné conservées et même - 21ème siècle oblige - des pages internet lues par l'héroïne. Ce mode de narration permet d'éviter ce qui aurait pu être le principal écueuil d'une telle histoire à savoir une image pathétique de la jeune fille, pour au contraire transmettre toute sa colère et sa gerbe au lecteur. Si la première partie prend du temps à planter le décor, la seconde s'accélère délivrant les intrigues, actionnant les personnages et livrant ce qui nous été annoncé. Fatal spectacle servi par les mots de Clara, un verbe puissant de force et de colère qui puise dans une langue très dure pour mieux ressentir le processus craignos qui est exposé.

 Un roman très intéressant de par sa forme et son fond, qui ne laisse ni indemne ni indifférent.

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Commentaires
O
Super journal, j'aime la fin et tout le gors de ses pensées, se serais super si vous en faite un sur Karin. Dans son ancienne école pour voir la vie qu'elle avait avant de venir dans celle de clara. En passent, j'ai trop ce livre !!!!!
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